Le leasing conclu par une entreprise en difficulté – crédit-bail immobilier

Alkanounia.info

*Mohamed Aghri.

Chercheur en droit immobilier, des affaires et notarial.

Le contrat de crédit bail ou leasing est un moyen de financement moderne, par lequel l’entreprise peut recourir pour obtenir des investissements en permettant de fournir l’immeuble dont elle aura besoin pour exercer ses activités, où  un établissement financier (banque) s’engage à acheter un bien immobilier au profit du bénéficiaire (l’entreprise) ou à financer sa construction par tranches et en le représentant comme loyer, étant donné cet établissement conserve la propriété de l’immeuble pendant la durée de l’usufruit et conclut un compromis de vente pour permettre à l’entreprise d’acheter cet immeuble après l’expiration du contrat. Autrement dit, le crédit bail est considéré une opération de crédit et de financement selon l’article 4 de la loi 34/03 qui stipule que « les opérations du crédit bail et de location avec option d’achat visées à l’article 3 ci-dessus…

   D’une autre manière, le contrat de crédit bail présente trois éléments essentiels (l’achat du bien par la société de crédit-bail, la location du bien et la promesse unilatérale de vente avec l’option d’achat).

En effet,  les éléments constitutifs d’un contrat de crédit-bail sont:

– Un contrat de vente entre le fournisseur du bien et la société de financement par crédit-bail qui a acheté le bien choisi par le preneur.

– Un contrat de location entre la société de crédit-bail et le preneur (crédit-bailleur et le locataire).

– Une promesse de vente entre la société de crédit-bail et le preneur.

1- Le contrat de crédit-bail en tant que contrat en cours : Il convient de noter qu’en ce qui concerne le contrat de crédit-bail immobilier, malgré que le législateur a consacré une section audit contrat dans le quatrième livre du code de commerce, il l’a simplement réglementé dans un seul article à savoir 588 qui a réglé de manière générale les contrats en cours.

   Par conséquent, le contrat de crédit-bail tant que contrat en cours doit réunir deux conditions essentielles, la première, concerne  la date du jugement d’ouverture de la procédure, ce contrat doit être conclu avant le prononcé du jugement et ne doit pas être expiré avant cette date. En ce qui concerne la deuxième condition,  il s’agit de la validité du contrat de crédit-bail dans la date de l’ouverture de la procédure à l’encontre du preneur car sa validité en tant que contrat en cours exige que ledit contrat ne doit pas s’expirer par voie de résiliation avant l’ouverture de la procédure.

   En conséquence, la réalisation des deux conditions donnera lieu à la considération du contrat de crédit-bail immobilier parmi des contrats en cours, ce qui entrainera l’ensemble des effets.

2- les effets du crédit-bail en tant que contrat en cours : Généralement, les contrats contiennent des clauses et des dispositions qui entrainent la résiliation de l’acte au moment du prononcé de jugement d’ouverture de la procédure pour s’éloigner à des risques et des conséquences d’ouverture de la procédure face à l’une des parties au contrat. Toutefois, le législateur a considéré l’inclusion de telles clauses  qui rendent le locataire à cesser de payer des tranches de loyer sera nulle de plein droit, en effet, l’article 588 du c.com considère que ce type de condition ou clause est interrompe en vertu d’un texte impérative qui ne peut pas être violé.

   C’est pour cela, on peut considérer l’interdiction de la résiliation des contrats comme étant moyen de garantie pour protéger l’ordre public économique, en l’appliquant sur toutes les dispositions juridiques, ce principe reste valide dans la procédure de redressement judiciaire, ainsi que durant la procédure de liquidation. Dans ce cadre, la cour de cassation française a considérée toute condition résolutoire pouvant rendre le débiteur en état de cessation de paiementde ses obligations financières à cause d’ouverture des procédures de redressement judiciaire est nulle et non avenue.

   En outre, le preneur à son tour, est soumit aux règles spécifiques des procédures collectives régissant tous les rapports entre le débiteur et les créanciers, l’importance de ces procédures est l’arrêt des poursuites individuelles et l’interdiction de payer les dettes avant l’ouverture de la procédure afin d’assurer une égalité entre les créanciers. À ce point la doctrine considère que ce principe n’a pas d’effet sur la place des créanciers étant que chacun a des droits différents à l’autre.

   Le créancier dans le contrat de crédit-bail immobilier jouit d’un privilège étant porteur de sûretés par rapport aux autres créanciers, dans ce cadre l’article 719  alinéa 3 du c.com énonce que « Le syndic notifie personnellement les créanciers titulaires d’une sûreté ayant fait l’objet d’une publication ou d’un contrat de crédit-bail publié,et s’il y a lieu, à domicile élu. » de ce fait, le titulaire du contrat de crédit-bail n’est pas concerné du délai exigé pour la déclaration des créances que s’il n’est pas notifié personnellement par le syndic.

   Dans le même cadre la cour de cassation dans son arrêt rendu en date de 4 février 2016 considère que le créancier hypothécaire rentre dans la case des créanciers ayant des sûretés concernés de la notification stipulée par l’article 719 précité.

   En tant qu’organe non judiciaire intervenant dans la procédure de traitement des difficultés des entreprises, le syndic est le seul habilité à décider le sort des contrats en cours, étant ayant un pouvoir d’appréciation afin d’exécuter ces derniers ou de les résilier, et le contrat de crédit-bail immobilier soumis aux même règles. En effet, le syndic dans ce cas là, a deux choix, soit de continuer à exécuter le crédit-bail immobilier soit l’inverse, dans le premier cas, il peut s’exprimer cette continuation de manière expresse ou tacite, c’est pour cela, on trouve que le syndic n’est soumis à aucun délai pour en décider.

   Dans un arrêt de la cour d’appel de commerce de Casablanca « Le preneurs’oblige à attendre la décision du syndic de ne pas continuer l’exécution du contrat de crédit-bail pour bénéficier du droit de revendication….Et que la compétence revient au syndic pour recevoir des  mises en demeure et non pas le locataire »

   Le fait que le syndic décide la continuation d’exécution du crédit-bail impose au bailleur et au syndic en tant qu’organe chargé de la direction de l’entreprise durant la période de traitement, l’obligation de payer les dettes objet de l’acte, puisque le syndic doit payer les tranches au profit de l’établissement du crédit-bail immobilier, à moins que ce dernier n’accorde pas d’autre délai pour s’effectuer le paiement. Et le bailleur s’engage à permettre à l’entreprise de jouir de l’immeuble, de ce fait, Il ne peut pas demander les tranches du loyer avant l’ouverture de la procédure, car il dispose du droit de déclarer sa créance  auprès du syndic comme les autres créanciers. En effet, la décision de continuer  le contrat du crédit-bail permet aux parties au contrat d’exécuter leurs obligations l’une envers l’autre, et ne peuvent pas se mettre d’accord sur la modification des dispositions de l’acte sans l’autorisation du juge-commissaire et l’accord du syndic.

   Dans le cas où le syndic décide de mettre fin à l’exécution du crédit-bail immobilier, il est obligé également de déclarer tacitement ou expressément sa décision, et ceci par voie de répondre à la mise en demeure du bailleur dans un délai d’un mois à compter de la notification.

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